Sorti par Bioware en 2011, Star Wars The Old Republic introduit l'univers de Gorges Lucas, époque Ancienne République, dans le milieu du MMORPG. Pour rappel, le même studio avait déjà réalisé le RPG solo Star Wars KOTOR et avait délégué la création d'un second opus à Obsidian. En démarrant ce projet de jeu de rôle en ligne, l'entreprise américaine cherchait à offrir un jeu susceptible d'accrocher trois types de public : les fans de SW, les amoureux des jeux Bioware, et les amateurs de MMO. Malgré un début de vie encourageant, le jeu est, comme tant d'autres, passé sous le rouleau compresseur WoW, obligeant les créateurs à passer leur produit sur le modèle très en vogue du free to play. Pour ma part, il s'agit de mon tout premier MMORPG (du moins, le premier sur lequel je dépasse les 2h de jeu). C'est donc avec un œil néophyte dénué de grille de lecture sur ce style de jeu que je vais m'appliquer à construire cette critique qui, à l'évidence, ne disposera pas de la rigueur d'analyse d'un praticien confirmé du genre.
Situé environ 1000 ans avant les films, et 300 ans après les KOTOR, le jeu nous positionne au milieu d'un énième conflit galactique opposant Jedi et Sith, l'occasion de nous rappeler que les siècles et millénaires ont beau passer, la technologie, elle, reste toujours au même point d'évolution. TOR propose de choisir un personnage placé sous les ordres de la République ou sous ceux de l'Empire. Une fois ceci fait, le choix de la classe s'offre à nous, chacune d'elle disposant de son propre scénario. Pour ma part, j'ai choisi de jouer un damage dealer bourrin, armé de deux sabres laser, histoire de faire cracher des kilos de dents (classe chevalier jedi). Je dois avouer que ma première déception sur cette classe aura été son scénario dont le seul mot que je puisse employer pour le qualifier est « insipide ». Au préalable, il convient de mentionner que Bioware avait fait la promesse d'un MMO extrêmement scénarisé. Elle a été tenue, chaque quête, même la plus insignifiante qui soit, dispose de ses lignes de dialogues et de ses doublages, mais le résultat peine à convaincre. La quête principale s'appuie sur une succession ininterrompue d’événements inintéressants qui suivent globalement toujours le même schéma : la République a besoin d'aide sur la planète N – elle a une armée mais c'est pourtant nous qui représentons l'unique solution au problème – l'Empire cherche a acquérir une arme top méga puissante que cette planète dissimule – bottage de cul du commandant Sith qui supervise l'opération et récupération du matos – fin. Si cette suite narrative manque déjà d'attrait dès sa première utilisation tant elle est horriblement banale, on finit par s'étonner de la façon dont les scénaristes font plonger le récit dans la caricature tellement elle est employée encore et encore, jusqu'à l’écœurement, tout au long de l'aventure. Le scénario tente de manière grotesque de nous impliquer via quelques choix dans les discussions tout aussi caricaturaux où phrases très gentilles et phrases très méchantes se partagent le gâteau. SWTOR est un jeu qui ne nous surprend jamais dans sa narration et qui manque cruellement de personnages pour l'incarner.
Les divers protagonistes que nous rencontrerons seront généralement soit des agents de la République présents pour nous donner nos ordres, soit des serviteurs de l'Empereur condamnés à finir en salade de Sith. TOR brille par son inaptitude à tisser une toile relationnelle entre ses personnages, et les rares phases de dialogue qui ponctuent les rapports entre le héros et ses partenaires de combats ne suffisent pas à redresser la barre. De même, le titre de Bioware est incroyablement faible lorsqu'il s'agit d'apporter de la substance aux différentes sociétés qu'il nous présente. Pour un jeu qui nous laisse le loisir de découvrir un nombre incroyable de planètes, il est véritablement dommage de voir que les aspects sociaux, culturels, historiques de ces mondes soient systématiquement minimisés à l'extrême (voire complètement écartés) au profit d'une écriture faignante qui cherche à nous obliger à vider la map de la faune environnante ou à nous faire saboter pour la 287ème fois un système de communication impérial entre deux quêtes fedex. Evidemment, les quêtes annexes ne parviennent pas non plus à élever le niveau : s'il peut apparaître sympa de voir le travail que Bioware a consacré au doublage intégral de celles-ci, le vide narratif qu'elles inspirent combiné à leur brièveté nous incite rapidement à passer les dialogues.
Je suis assez surpris quand, a posteriori, je relis tous ces tests rédigés par la presse qui font l'éloge d'une qualité d'écriture des quêtes qu'après 135h de jeu, je cherche encore. SWTOR m'a montré tout au long de l'aventure un scénario terriblement creux, superficiel et profondément manichéen. Mais peut-être n'ai-je pas pris la bonne classe. Cela étant, je constate Bioware n'a pas su retenir la véritable leçon d'écriture qu'était le KOTOR 2 d'Obsidian. Le MMO achève de façon déplorable les événements amorcés dans KOTOR 1, qui furent si finement prolongés dans sa suite, en plus de réserver quelques mauvaises surprises aux fans, je pense notamment à la résurrection improbable et si mal justifiée d'un personnage important de cette saga.
Heureusement, le travail réalisé sur l'ambiance nous réconcilie très vite avec le jeu. A vrai dire, sur ce point précis, SWTOR est un peu le jeu ultime pour le fan, un petit bijou de reconstitution. Il reconstruit à merveille les différents paysages qui parsèment l'univers Star Wars dans des environnements aussi gigantesques que majestueux, les panoramas à couper le souffle ne manquent pas. De Hoth à Tatooïne en passant par Voss et Coruscant, les mondes que nous explorons dévoilent une direction artistique sublime qui se renouvelle à chaque spatioport. Mention spéciale à Nar Shadaa, ce monde du crime hyper urbanisé, noyé dans les enseignes lumineuses, qui nous aspire dans son atmosphère nocturne hypnotisante. Le tout manque peut-être un peu de vie, les quelques habitants qui animent les territoires galactiques sont aussi peu nombreux qu'ils sont rigides, mais l'immersion reste saisissante.
Mon DPS a eu fort a faire dans la galaxie Star Wars pour se frayer un chemin jusqu'à l'empereur Sith. Le gameplay du chevalier jedi repose sur une utilisation parcimonieuse des quelques buffs mis à sa disposition et des puissantes compétences au sabre laser qui lui permettent de multiplier les bains de sang. Le maniement de l'arme jedi fait toujours son petit effet, en terme visuel et en terme de sensations, surtout lorsque l'on en tient deux. Si le début du jeu sur Tython ne pose aucune difficulté particulière, la suite demande un peu plus d'investissement au joueur. Survivre dépend de l'ordre dans lequel nous utilisons nos compétences et de la rapidité à l'exécuter. Ne pas utiliser le bon buff au bon moment peut s'avérer fatal en plein cœur de bataille, surtout si comme moi, on n'accompagne pas le joueur d'un compagnon healer mais d'un autre DPS afin d'assurer un maximum de dégâts. L'ensemble s'avère plutôt jouissif lors des affrontements contre les ennemis les plus coriaces qui nous font sentir de près le parfum de la mort. Cela étant, la majeure partie des compétences s'acquiert en début de partie, le reste de l'épopée se prolonge au gré d'un renouveau dans les capacités extrêmement limité. Mécaniquement, les stimulantes premières heures de jeu laissent progressivement place à une stagnation ludique qui génère une lassitude profonde. Je bénie Bioware d'avoir organisé un week-end XPx2 qui m'aura permis d'accélérer considérablement mon avancée dans la quête principale et réduire mon exposition à un scénario sans intérêt épaulé par un système de combat incapable de se renouveler.
Bien évidemment, le système de jeu offre d'autres particularités qui permettent, après quelques génocides d'impériaux, de s'éloigner de la très conventionnelle quête de classe. Les instances PVE offrent leur concentré de fun par lequel il serait dommage de ne pas passer. Après avoir formé une équipe de 4 joueurs, nous pouvons donc partir à la conquête de ces « zones litigieuses » souvent intéressantes à explorer, porteuses d'un montant important d'XP et détentrices de loots appréciables. Il est cependant regrettable qu'elles s'accomplissent systématiquement par l'emploi d'une brutalité très sommaire qui met très peu à profit le potentiel tactique et coopératif que ce genre de quête pourrait, à mon sens, impliquer. Les joueurs n'ont pas besoin de beaucoup communiquer pour les achever, réunir un tank, un healer et deux DPS suffit largement pour rouler sur ces zones pour peu que chacun fasse son boulot. La diversification dans les stratégies d'approche est quasi inexistante.
Lorsque l'on est fatigué de taper des ennemis aussi bêtes qu'immobiles, on se recentre sur quelques parties de PVP qui affichent avec panache leur dose de violence et d'effets spéciaux. Combat à mort, capture de bases, protection d'objectifs, les modes de jeux divers et variés offrent un support attractif pour se sabrer amicalement la tronche (j'ai une petite préférence pour le « Huttball », une sorte de rugby quelque peu... revisité). Toutefois, je regrette que le ciblage des adversaires ne soit pas toujours très pratique, d'autant qu'il est difficile pour un DPS càc de se faire une place lorsque l'on est entouré de mages qui nous pourrissent de debuff et d'attaques à distance. Cela dit, je relativise cette critique en constatant mes classements : systématiquement dans les derniers, sinon dernier. Un gros noob, je suis. M'entraîner, je dois.
Dernière singularité du gameplay, les combats spatiaux. Ils prennent deux formes différentes. La première, intégrée dès la sortie du jeu, se développe sous la forme d'un rail shooter ennuyant, une sorte de shoot'em up raté, d'Ikaruga du pauvre que l'on oubliera très vite. La seconde nous rappelle très vite les excellents Rogue Squadron, mais en format PVP. Aux commandes de notre chasseur, on canarde joyeusement les unités ennemis avec l'aide de quelques compétences et après avoir soigneusement équipé notre vaisseau du matériel adéquat. Je n'ai pas passé beaucoup de temps dans ces combats aériens, mais je salue l'initiative.
Star Wars TOR, c'est d'une certaine manière le rêve du fan de la saga qui devient réalité : pouvoir explorer les différents mondes sortis de l'imagination féconde de la mythologie de Georges Lucas. Le travail conçu sur l'ambiance est exceptionnel, il n'est pas exagéré de dire que le MMO de Bioware est probablement le jeu vidéo SW le plus abouti en la matière. Celui opéré sur la narration l'est beaucoup moins, il sera aussi vite oublié que consommé. Le contenu du gameplay fait preuve d'une évidente richesse, qui reste néanmoins alourdie par une certaine répétitivité du système de combat et une construction du PVE qui met trop peu l'accent sur une véritable forme de coopération. Un jeu pas toujours extraordinaire, mais très sympa. A faire.